Code fiscal le plus long par pays : qui détient le record ?

Trente heures, c’est le temps qu’il a fallu à un prestigieux cabinet d’avocats new-yorkais pour dénicher la véritable signification du mot « revenu » dans l’enchevêtrement du code fiscal américain. Mais ce marathon juridique n’est rien face à la démesure de certains États, où les textes fiscaux s’étirent à perte de vue, défiant l’endurance des lecteurs les plus acharnés, au point que même les rats de bibliothèque finissent par battre en retraite.

Pourquoi tant d’États persistent-ils à empiler les articles et les sous-alinéas, jusqu’à donner le vertige aux plus chevronnés des fiscalistes ? Entre la volonté d’éradiquer la moindre brèche et la manie de tout encadrer, la compétition du code fiscal le plus tentaculaire réserve bien des surprises, et pas seulement aux spécialistes du chiffre.

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Des codes fiscaux de plus en plus volumineux : un phénomène mondial

La prolifération des codes fiscaux n’a rien d’un caprice isolé : elle s’impose aujourd’hui comme une tendance planétaire. D’après l’OCDE, le rapport impôts/PIB moyen a grimpé de 24,9 % à 34 % entre 1965 et 2022, révélant à la fois l’appétit grandissant des finances publiques et la multiplication des mécanismes fiscaux.

En 2022, la France décroche la médaille du taux de prélèvements obligatoires le plus élevé de l’OCDE, culminant à 46,1 % du PIB. Son code fiscal surpasse, en volume, celui des États-Unis, souvent cités en exemple pour leur complexité. À l’autre bout du spectre, le Mexique ferme la marche avec seulement 16,9 % du PIB prélevé par l’impôt.

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La vague ne se limite pas à la France. Parmi les champions de la fiscalité lourde, on retrouve :

  • Danemark : 41,9 % du PIB en 2022, longtemps leader de la catégorie
  • Norvège : 44,3 %
  • Autriche : 43,1 %
  • Finlande : 43 %
  • Italie : 42,9 %

Ce foisonnement de textes fiscaux découle d’une quête d’exhaustivité, qui va de pair avec la sophistication des économies modernes. Pour garantir équité, lutter contre l’évasion ou renforcer la compétitivité, les dispositifs s’accumulent. En France, la progression du ratio impôts/PIB — de 33,4 % à 46,1 % en un peu moins de soixante ans — illustre à quel point la pression fiscale et la densité des lois se sont intensifiées.

Pourquoi certains pays accumulent-ils des milliers de pages de législation fiscale ?

La complexité fiscale ne tombe pas du ciel : elle germe dans la diversité économique, s’alimente des tensions entre intérêts concurrents, et prospère à chaque réforme. Les nations aux économies avancées, comme la France ou les États-Unis, ajustent leur système fiscal presque en continu pour coller aux évolutions du marché du travail, à l’éclosion de nouveaux types de revenus, ou encore à la mondialisation des échanges. Résultat : une inflation de lois, d’amendements, d’exceptions, et de régimes transitoires.

L’OCDE et l’Union européenne poussent, elles aussi, à l’harmonisation. Pour contrer l’évasion fiscale et limiter les pratiques jugées abusives, chaque année voit s’ajouter un nouvel arsenal à la loi de finances. Le texte enfle, la lisibilité s’évapore.

Le lobbying des secteurs professionnels ajoute une couche supplémentaire. Niches, exonérations, mesures taillées sur mesure : chaque concession à un secteur donné épaissit le code. Derrière l’ambition d’équité et de progressivité, les réformes s’empilent, transformant la législation fiscale en millefeuille.

  • Poursuivre la justice fiscale revient à multiplier les situations spécifiques, donc les exceptions.
  • Adopter les normes internationales et lutter contre l’optimisation fiscale, c’est introduire toujours plus de sophistication dans le dispositif.

Au bout du compte, la longueur des codes fiscaux reflète le visage d’économies complexes, tiraillées entre exigences sociales, arbitrages politiques et adaptation permanente à un monde en mouvement.

Zoom sur les records : qui détient le code fiscal le plus long au monde ?

La France règne sans partage sur la scène des codes fiscaux les plus imposants de l’OCDE. Elle a bâti, réforme après réforme, un édifice législatif si dense qu’il relègue même les États-Unis au rang d’élève appliqué, malgré leur réputation d’hyper-réglementation. Cette première place ne doit rien au hasard : la France conjugue le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé (46,1 % du PIB en 2022) à un code fiscal qui ne cesse de s’allonger, loin devant le Danemark (41,9 %), la Norvège (44,3 %), l’Autriche (43,1 %), la Finlande (43 %) et l’Italie (42,9 %).

  • En France, le ratio impôts/PIB a grimpé de 33,4 % à 46,1 % entre 1965 et 2022.
  • Aux États-Unis, il n’a progressé que de 23,5 % à 27,7 % sur la même période.
  • La moyenne OCDE plafonne à 34 %.

À l’autre extrémité, le Mexique illustre une approche radicalement différente : 16,9 % du PIB seulement prélevé par l’impôt. Sur le terrain de la compétitivité fiscale, l’Estonie trace sa propre voie avec une flat-tax à 20 % sur le revenu et une fiscalité des bénéfices limitée aux dividendes distribués. La Lettonie a emboîté le pas, confirmant la volonté de certains pays baltes de simplifier à l’extrême.

La France, malgré des tentatives répétées de modernisation, conserve ainsi le code fiscal le plus touffu et la fiscalité la moins attractive selon l’ITCI, preuve d’un choix politique assumé : préserver un modèle social généreux, quitte à défier la patience des fiscalistes.

document officiel

Comprendre les conséquences concrètes pour les citoyens et les entreprises

La longueur du code fiscal n’est pas qu’une prouesse de technicité ; elle a des impacts très réels sur l’économie et la société. Plus le corpus s’alourdit, plus les coûts de conformité explosent pour les entreprises, en particulier pour les PME, qui n’ont ni les moyens ni les équipes pour jongler avec un maquis de règles. Les cabinets de conseil prospèrent, mais les plus petits acteurs s’essoufflent. Ce déséquilibre nourrit une inégalité fiscale : ceux qui disposent des ressources pour contourner ou optimiser en sortent renforcés, les autres restent sur le bord de la route.

  • En 2022, la Tax Foundation évalue à près d’un tiers la part du revenu moyen reversée sous forme d’impôts et de cotisations pour un salarié célibataire européen.
  • Certains pays d’Europe de l’Est (Roumanie, Bulgarie, Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Macédoine du Nord) affichent un taux d’impôt sur le revenu de seulement 10 %, pour séduire les investisseurs étrangers.

L’enchevêtrement des normes fait aussi grimper l’incertitude juridique et le risque de contentieux. Les procédures fiscales se multiplient, minant la prévisibilité cruciale pour toute décision d’investissement. Ailleurs, les exemples de simplification tranchent avec la tendance générale : la Nouvelle-Zélande a allégé sa fiscalité en supprimant droits de succession et taxes sur les salaires ; la Belgique, elle, a abaissé le taux d’impôt sur les sociétés de 33,99 % à 29,58 % dès 2018.

Enfin, la perception de l’impôt dépend beaucoup du contexte. En Suède ou au Danemark, la confiance dans l’administration fiscale et la qualité des services publics font accepter, sans révolte, des taux élevés. En France, c’est une autre musique : la complexité du système alimente la défiance et alourdit le débat sur la justice de la contribution collective.

Au bout de ce labyrinthe de textes, une question demeure : le code fiscal français continuera-t-il d’enfler, ou verra-t-on un jour émerger un nouveau champion de la page fiscale ? D’ici là, les fiscalistes n’ont pas fini d’aiguiser leurs crayons…

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